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Mandat Ad Hoc et Modes alternatifs de règlement des conflits

By 8 janvier 2020février 27th, 2020No Comments

 Pas d’exclusion du premier par les seconds

Un récent Arrêt rendu par la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence permet de mener une réflexion sur la compatibilité de la procédure de Mandat ad hoc avec les modes alternatifs de règlement des conflits. Une occasion de rappeler et préciser l’objectif et les conditions d’ouverture d’une procédure de Mandat ad hoc, outil encore trop méconnu du traitement préventif des difficultés des entreprises.

Rappel sur le mandat Ad Hoc

La procédure de Mandat ad hoc est une procédure dite de prévention des difficultés des entreprises visée par l’article L. 611-3 du Code de Commerce en son Livre VI « Des Difficultés des Entreprises » rédigé comme suit :

« Le président du tribunal peut, à la demande d’un débiteur, désigner un mandataire ad hoc dont il détermine la mission. Le débiteur peut proposer le nom d’un mandataire ad hoc. La décision nommant le mandataire ad hoc est communiquée pour information aux commissaires aux comptes lorsqu’il en a été désigné ».

Ce texte est très laconique mais il est désormais acquis que :

  • le mandat ad hoc est une procédure amiable destinée à permettre à un débiteur de placer, dans un cadre strictement confidentiel, des négociations de tous ordres avec tout créancier ou partenaire (bailleur, fournisseur, banquier, client…).  Sous l’égide d’un mandataire ad hoc (généralement un Administrateur Judiciaire) désigné par le Président du Tribunal (Tribunal de Commerce pour les sociétés commerciales ou Tribunal Judiciaire pour les sociétés civiles et associations).
  • si aucune condition d’ouverture de la procédure de Mandat ad hoc n’a été fixée par l’article précité et que la décision est laissée à la libre appréciation du président du tribunal saisi, le débiteur sollicitant la désignation d’un mandataire ad hoc ne doit pas être en état de cessation des paiements. En effet, cette procédure est inscrite dans le Livre VI du Code de Commerce aux côtés des procédures de conciliation et collective. Et les conditions d’ouverture sont déterminées par l’état de cessation des paiements.

 

Rappel sur les modes alternatifs de règlement des conflits

Un mode de règlement des conflits est considéré comme alternatif par comparaison avec le système de décision judiciaire.

Il s’agit d’un processus permettant aux parties à un conflit de rechercher, dans un cadre amiable, une solution transactionnelle pour mettre fin à leur différend en évitant qu’une décision judiciaire s’impose à elle à l’issue de débats.

Ces modes alternatifs ne cessent d’être promus et intégrés dans le droit français (notamment la loi 2016-1547 du 18 novembre 2016 de Modernisation de la justice du XXIè siècle puis la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 pour la Justice).

Il s’agit par exemple :

  • de la possibilité pour le juge commercial d’inciter les parties à concilier devant lui
  • de la médiation imposée préalablement à toute assignation devant le tribunal judiciaire (même en référé)
  • de celle pouvant être imposée par ce même tribunal au cours d’une procédure
  • des procédures dites participatives…

Comptabilité du mandat Ad Hoc et des modes alternatifs de règlement des conflits

Cette compatibilité ressort d’un Arrêt de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence du 21 novembre 2019 (RG N°19/10719) qui considère que l’existence de procédures judiciaires en cours – dont l’issue peut être traitée dans le cadre d’un mode alternatif de règlement des conflits – n’est pas un obstacle à la désignation d’un mandataire ad hoc.

Dans le cas d’espèce soumis à la Cour d’Appel, le débiteur s’était vu refuser la désignation d’un mandataire ad hoc au motif que, eu égard à une procédure judiciaire en cours, le débiteur pouvait actionner un mode alternatif de règlement des conflits (médiation ou la conciliation du Code de procédure civile) .Plutôt que demander l’ouverture d’une procédure de Mandat ad hoc.

La Cour d’Appel a censuré l’Ordonnance initialement rendue. Déclarant que l’existence de procédures judiciaires en cours n’est pas exclusive de la faculté pour l’entreprise de solliciter la désignation d’un mandataire ad hoc dans le cadre d’une procédure de prévention des difficultés de l’entreprise.

Cette appréciation, dont on peut présager qu’elle serait confirmée par la Cour de Cassation, est fondamentale dans le cadre d’une réflexion sur la combinaison des modes alternatifs de règlement des conflits et des procédures de prévention du Livre VI du Code de Commerce puisque :

  • les modes alternatifs de règlement des conflits sont circonscrits au règlement stricto sensu du litige entre les parties et restent guidés par une approche juridique dudit litige
  • les procédures de prévention du Livre VI du Code de Commerce dont la procédure de mandat ad hoc ont pour objet d’inscrire la recherche de la solution à un litige dans le cadre plus large de la pérennité de l’entreprise, du maintien de l’emploi et de la sauvegarde de l’activité.

Si les modes alternatifs de règlement des conflits sont une véritable avancée pour régler singulièrement un différend, la procédure de Mandat ad hoc reste l’outil indispensable à mettre en œuvre dans le cadre du traitement général des difficultés de l’entreprise qui, souvent, sont la conséquence du conflit singulier précité.

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