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Salariés itinérants et temps de travail effectif

By 1 février 2023No Comments

Le temps de trajet domicile-premier client des salariés itinérants peut désormais, dans certaines conditions, constituer du temps de travail effectif

Jusqu’à présent, en France, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du travail (ou en en revenir) ne constituait pas du temps de travail effectif.[1]

Le Code du travail dispose simplement que lorsque ce temps de trajet dépasse « le temps normal » de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, une contrepartie doit être attribuée par l’employeur, sous forme de repos ou sous forme financière (article L. 3121-4 du Code du travail).

La Cour de cassation a toujours suivi cette ligne. Et jugeait ainsi systématiquement que les temps de trajet domicile-premier et dernier client ne constituait pas du temps de travail effectif [2].

Pour sa part, depuis une directive de 2003, un arrêt de la CJUE 2015, le droit européen considérait au contraire que le temps de trajet constituait du temps de travail effectif[3].

Deux arrêts récents de la CJUE du 9 mars 2021[4], confirment cette position, dont la notice explicative précise que les notions de « temps de travail » et de « période de repos » ne peuvent être définis unilatéralement par les Etats membres. Et se doivent donc d’être conformes à la directive européenne du 4 novembre 2003.

Ce que dit la Cour de Cassation

La Cour de cassation se range à la position européenne, et dans son arrêt du 23 novembre 2022 (Cass. Soc. N°20-21.924) juge désormais :

  • que le temps de trajet des salariés itinérants entre leur domicile et le premier ou dernier client peut être considéré comme du temps de travail effectif, devant donner lieu à rémunération au titre de la durée du travail,
  • si pendant ses temps de trajet le salarié, tout en conduisant, est en mesure de fixer des rendez-vous, d’appeler et de répondre à ses divers interlocuteurs, clients, directeur commercial, assistantes et techniciens, grâce à son téléphone portable.

Cette position jurisprudentielle va nécessairement avoir des répercussions pour les entreprises ayant des salariés itinérants ou exposés à des déplacements. Et justifie qu’une réflexion soit menée au sein des entreprises pour prendre en considération ces nouvelles contraintes.

En cas de litige sur les temps de trajet, le juge devra vérifier :

  • si, pendant le temps de trajet, le salarié itinérant doit se tenir à la disposition de l’employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles. Ce qui caractérise du temps de travail effectif. Si tel est le cas, ce temps de trajet sera pris en compte pour apprécier le respect des seuils et plafonds de durée du travail. Et le salarié pourra prétendre à la rémunération correspondante ;
  • en revanche, si ce temps de trajet ne constitue pas un temps de travail effectif, compte tenu de la situation du salarié itinérant durant ses déplacements, celui-ci ne pourra prétendre qu’à la contrepartie prévue par l’article L. 3121-4 du code du travail, s’il en remplit les conditions.

[1]  Pour rappel, le temps de travail effectif se définit par  : « se tenir à la disposition de l’employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles » (article L. 3121-1 du Code du travail).

[2] Cour de cassation, 30 mai 2018, n°16-20.634

[3] Directive n°2003/88/CE du 4 novembre 2003 et CJUE, 10 septembre 2015, affaire C-266/14/Tyco

[4] CJUE, 9 mars 2021, affaire C-344/19 et C-580/19

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