La Cour de cassation examinera le 8 juillet 2019 deux demandes d’avis transmises par les Conseils de Prud’hommes de Louviers et de Toulouse, portant sur l’inconventionnalité du barème d’indemnisation du licenciement avec les conventions internationales (notamment l’article 10 de la Convention n°158 de l’OIT et l’article 24 de la Charte sociale européenne).
En effet, comme nous l’avons évoqué dans nos précédents articles, l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 a encadré les indemnités prud’homales octroyées dans le cadre de licenciements jugés dépourvus de cause réelle et sérieuse, en instaurant un barème plancher / plafond obligatoire, dépendant de l’ancienneté du salarié licencié et du nombre de salariés dans l’entreprise.
Ce barème fait l’objet de vifs débats depuis maintenant plus d’un an et demi, et une décision de la Cour de cassation aurait permis de clore ce débat qui instaure une certaine insécurité juridique, que ce soit pour les salariés ou les employeurs.
Pour autant, la question qui cristallise les tensions depuis de nombreux mois risque de ne pas être réglée par l’avis qui sera rendu par la Cour de cassation au mois de juillet prochain.
En effet, la Haute juridiction a toujours refusé de répondre aux questions portant sur la conventionnalité des normes internes par rapport à un texte international dans le cadre de procédures d’avis transmises par les juges du fond.
Cela a ainsi été le cas aux termes de deux avis de la Cour de cassation rendus le 16 décembre 2002 (n°00-20.008) et le 12 juillet 2017 (n°17-70.009) :
« Les questions, en ce qu’elles concernent la compatibilité de la mise à la retraite, hors l’accord du salarié, prévue par les dispositions de l’article L. 1237-5 du code du travail avec la convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail relative à la cessation de la relation de travail à l’initiative de l’employeur, ne relèvent pas de la procédure d’avis prévue par les articles susvisés, l’office du juge du fond étant de statuer au préalable sur cette compatibilité ; »
En effet, la Cour de cassation considère que les juges du fond doivent eux-mêmes trancher ce type de question avant qu’elle ne puisse être saisie en dernier recours.
Il est donc probable que cet avis tant attendu, qui devrait être rendu dans les jours suivant le 8 juillet 2019, ne tranche pas cette question qui continue de diviser les praticiens.
Dans l’intervalle, d’autres Conseils de Prud’hommes se sont prononcés sur l’inconventionnalité du barème, et notamment :
- Le Conseil de Prud’hommes de Bordeaux, dans sa décision du 9 avril 2019 (n18/00659) ;
- Le Conseil de Prud’hommes de Créteil, dans sa décision du 15 avril 2019 (n°18/01812) :
« Vu l’article 10 de la Convention n° 158 de l’organisation internationale du travail ratifiée par la France en date du 16 mars 1989 ; attendu selon ce texte, que si les tribunaux arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, […], ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme approprié ;
Attendu que le conseil de prud’hommes tient de ces dispositions directement applicables aux litiges opposant les travailleurs et les employeurs sur le territoire national, le pouvoir d’évaluer au plus juste le préjudice dont a souffert un salarié abusivement privé d’emploi du fait d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Qu’au cas particulier de M. K., les circonstances de la rupture de son contrat de travail liées au non-versement de la rémunération, son ancienneté, et les difficultés éprouvées par l’intéressé pour retrouver un emploi appellent une juste réparation de son préjudice que le conseil évalue et fixe à la somme de 17 000 € de dommages-intérêts ; ».
- Le conseil de prud’hommes de Montpellier, dans son jugement du 17 mai 2019, (n°18/00152), au motif qu’il ne permettrait pas une « réparation exacte » du préjudice subi.
Décidément à suivre…